Le Conseil des ministres a évité hier d’aborder la conférence de Bruxelles, jeudi, sur les réfugiés, de peur que la discussion ne dégénère. Le chef du gouvernement, Saad Hariri, qui représentait le Liban à Bruxelles, avec un groupe de ministres, a gardé le silence à ce sujet durant la réunion, alimentant ainsi la rumeur sur une crise latente entre Baabda, le palais Bustros et le Sérail autour du dossier des réfugiés. De sources proches de la présidence du Conseil, on indique que les chefs de l’État et du gouvernement s’étaient entendus avant la réunion qui s’est tenue à Baabda pour ne pas évoquer ce dossier, d’autant que le ministère des Affaires étrangères n’a pas eu la possibilité de présenter à Bruxelles le document qui expose la vision libanaise du règlement de l’affaire des déplacés syriens.
Il reste qu’il est quand même possible de dire que le Liban officiel rejette le communiqué de Bruxelles dans lequel il a vu une tentative indirecte de maintenir les réfugiés sur place. Aussitôt le Conseil des ministres terminé, le chef de la diplomatie, Gebran Bassil, a en effet tenu une conférence de presse pour rejeter « un affront à la souveraineté libanaise ». Le choix de Baabda pour donner le point de vue du Liban sur la question se justifie par la volonté de marquer le côté solennel de la conférence de presse. Moins de deux heures plus tard d’ailleurs, le président Michel Aoun puis le chef du législatif, Nabih Berry, devaient chacun publier un communiqué rejetant le communiqué de Bruxelles. Un rejet qui se justifie principalement par les risques d’implantation des Syriens accueillis au Liban, lesquels transparaissent dans l’insistance des participants à la conférence de Bruxelles sur « le retour volontaire », « le retour temporaire », « la volonté de rester », « l’intégration dans le marché du travail », ou encore « l’intégration au sein de la société libanaise », en parlant de l’avenir des réfugiés syriens.
M. Bassil a sans ambages accusé la communauté internationale d’encourager ces derniers à rester au Liban, soulignant que les propositions faites à Bruxelles sont en contradiction avec la Constitution libanaise et que rien n’empêche aujourd’hui, au double plan politique et de sécurité, leur retour chez eux.
(Lire aussi : Bassil à « L’OLJ » : Il est beaucoup trop tôt pour parler de présidentielle)
Le communiqué publié plus tard par Baabda va dans le même sens. « Le Liban tient à une solution politique en Syrie, mais il ne faut pas conditionner le retour des déplacés à cette solution. De par mon discours d’investiture, je suis tenu de sauvegarder l’indépendance du Liban et l’intégrité de son territoire, et le contenu du communiqué contrevient à la Constitution », a expliqué le président Aoun.
Quant à Nabih Berry, il a annoncé son opposition « et celle de tout le Parlement au communiqué » de Bruxelles, « qui encourage l’implantation des réfugiés, la fragmentation de la Syrie et l’éparpillement de son peuple », mais non sans avoir auparavant reproché au gouvernement de n’avoir pas tenu compte de ses conseils d’engager des pourparlers avec le régime de Damas en vue d’un retour des réfugiés.
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commentaires (6)
Le libanais refuse l'implantation de qui que se soit sur son sol...
Soeur Yvette
16 h 52, le 27 avril 2018