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Liban - Initiative

Ozy, un restaurant à Ehden qui n’emploie que des personnes à besoins spéciaux

Après avoir perdu son fils unique, décédé à l’âge de 16 ans, Jacqueline Makary a décidé de prendre soin des personnes présentant un handicap mental.

Un employé d’Ozy préparant le café à un client. Photos « an-Nahar »

« Lorsqu’un événement malheureux vous arrive, vous êtes devant trois options : vous le laissez soit vous définir, soit vous détruire, soit vous rendre plus forte », avait écrit un jour Dr Seuss, l’auteur américain de Horton Hears a Who. Lorsque Jacqueline Makary a perdu son fils unique, alors âgé de 16 ans, elle a opté pour un quatrième choix : elle a décidé de faire du bien aux autres. Elle a décidé de prendre soin des personnes à besoins spéciaux en ouvrant un resto-café à Ehden, au Liban-Nord, qui les embauche et leur offre une opportunité de s’insérer dans la société. 

« Je travaillais pour assurer l’avenir et l’éducation de mon fils unique, Semaan. À 16 ans, il est tombé subitement malade et vingt jours après, je l’ai perdu », raconte-t-elle à L’Orient-Le Jour. Après le décès de son fils qui constituait pour elle sa raison de vivre, Mme Makary, communément connue sous le nom de Em Semaan, a cessé de travailler et a fermé les portes du salon de coiffure pour dames qu’elle dirigeait.

Peu après le quarantième de son fils, Em Semaan a eu l’idée de visiter un centre pour les personnes à besoins spéciaux, al-Inaya al-Ilahiya, qui se trouvait à proximité de sa maison d’hiver à Zghorta. « J’ai découvert un monde qui, jusque-là, m’était méconnu », confie-t-elle. « J’ai commencé à leur rendre visite de plus en plus souvent et à leur préparer des sorties et des promenades pendant les jours où ils n’étaient pas au centre », ajoute-t-elle. Entre-temps, Em Semaan avait rouvert son salon où elle avait fondé une petite caisse, alimentée par les petits dons de ses clientes, destinée à financer ces sorties.   « Un jour, une amie émigrée en Australie, venue passer ses vacances au Liban, m’a suggéré de rentrer avec elle, quitte à organiser des collectes de fonds auprès de la diaspora libanaise », se souvient Em Semaan avant de poursuivre : « J’ai trouvée l’idée folle au début mais au final, j’ai cédé et comme par miracle, j’ai obtenu le visa huit jours après. »


Faire plaisir aux Libanais d’Australie
C’est lors de son séjour en Australie qu'Em Semaan a appris, grâce à une amie, qu’il existe en Turquie un restaurant qui n’embauche que des personnes à besoins spéciaux. « Je lui ai tout de suite répondu : “Voilà ce que je ferai de cet argent” », enchaîne-t-elle. Pour remercier la diaspora libanaise et lui rendre hommage, Em Semaan a choisi de baptiser son nouveau projet Ozy, qui sonne comme Aussie, ou Australien, dans l’argot du pays.

Le resto-café fonctionne grâce à une équipe de quinze employés au total. « Trois groupes de cinq employés assurent, l’un à la suite de l’autre, les heures de travail pendant la matinée, l’après-midi et la soirée », explique Mme Makary. « Ils ont entre 27 et 40 ans », ajoute-t-elle. C’est principalement Em Semaan qui s’occupe de la cuisine et de la préparation de la nourriture ; pour leur part, les employés servent à table et l’assistent en coulisses. « Je les ai formés autant que possible et chacun d’eux est particulièrement doué pour une tâche spécifique », poursuit-elle. Johnny, 27 ans, est très sociable et il est donc surtout chargé de servir à table. Un large sourire aux lèvres, il accueille les clients dès leur entrée, tend la main pour se présenter et finit par lancer un joyeux « Ahla w sahla ».

« Si vous ne redevenez pas de petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux », rappelle Em Semaan citant l’Évangile. « J’admire chez ces personnes-là cette joie et cette paix que nous autres perdons dès que l’on franchit le seuil de l’enfance, confie-t-elle. Je pense qu’ils m’ont offert, et continuent à m’offrir, beaucoup plus que ce que je leur donne moi-même. » « Ils m’ont redonné la paix », ajoute-t-elle.

Dans le restaurant qu’elle a fondé, Em Semaan est bénévole. Les employés sont payés tous les mois et le reste des revenus sera consacré à d’autres projets pour faciliter davantage l’insertion des individus à besoins spéciaux dans la société. « Je rêve de mettre à leur disposition une infrastructure qui renforce leur autonomie et dans laquelle ils ont accès à toutes les facilités dont ils ont besoin », conclut-elle.

Le resto-café Ozy a ouvert ses portes pour accueillir le public et le familiariser avec l’idée de l’emploi et de l’insertion dans la société des personnes à besoins spéciaux. Mais il n’attendra pas, les bras croisés, l’afflux des clients. Em Semaan et les amis qui l’aident à gérer son projet préparent des soirées et des activités culturelles, musicales et dansantes, pour encourager les gens à se rendre à Ozy. La première activité est une soirée de ciné-club au cours de laquelle sera diffusé Rain Man, de Barry Levinson, avec Dustin Hoffman et Tom Cruise, sorti en salles en 1988, et qui est considéré comme l’un des premiers longs-métrages à aborder le thème de l’autisme.



Pour mémoire

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« Lorsqu’un événement malheureux vous arrive, vous êtes devant trois options : vous le laissez soit vous définir, soit vous détruire, soit vous rendre plus forte », avait écrit un jour Dr Seuss, l’auteur américain de Horton Hears a Who. Lorsque Jacqueline Makary a perdu son fils unique, alors âgé de 16 ans, elle a opté pour un quatrième choix : elle a décidé...

commentaires (4)

Grand merci pour une initiative très louable!

Wlek Sanferlou

14 h 31, le 23 juillet 2018

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Grand merci pour une initiative très louable!

    Wlek Sanferlou

    14 h 31, le 23 juillet 2018

  • Magnifique initiative, a copier partout au Liban

    Jack Gardner

    10 h 21, le 23 juillet 2018

  • Super que Ehden devient un Eden pour les handicapes aussi.

    WORM Ramza

    08 h 44, le 23 juillet 2018

  • Bravo!

    Yves Prevost

    06 h 46, le 23 juillet 2018

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