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Liban - Société

Une vidéo virale expose la situation des transgenres au Liban

Capture d’écran de la vidéo virale. On aperçoit une femme trans se faire battre.

Il y a quelques jours, une femme transgenre se faisait frapper en pleine rue. La vidéo est devenue virale en moins de 5 heures sur WhatsApp et Facebook, déclenchant de nombreuses réactions et partages amusés sur les réseaux. La situation des personnes transgenres au Liban est pourtant dramatique, des militants se battent et tirent la sonnette d’alarme sur ce plan depuis des années.
« La vidéo, dont on ne sait rien, n’est pas autant importante que le contexte. » Tarek Zeidan est un activiste basé à Beyrouth, futur directeur de Helem, une ONG et un centre social pour les LGBT du pays. Autour d’un café à Gemmayzé, il revient sur la situation des femmes transgenres au Liban, longtemps oubliées et dont la visibilité commence seulement à émerger parmi les cercles LGBT à Beyrouth. Pourtant, sur WhatsApp ou Facebook, on retrouve des vidéos de personnes battues et humiliées depuis des années.
Tarek est accompagné de Norma, une femme trans militante sur les réseaux sociaux. « Je ne suis pas surprise du succès de cette vidéo, ce n’est pas la première », observe-t-elle. Les réactions des Libanais en ligne sont toujours les mêmes, entre dégoût et « elles ont eu ce qu’elles méritent ». Il y a six ans, une mendiante transgenre était humiliée et battue à Hamra, avant d’être de nouveau agressée et filmée cette année.

Pour Tarek, le motif des violences répétées à l’encontre des transgenres réside dans l’objectification de la communauté, ainsi que l’ignorance de la population et sa « curiosité destructrice, qui se transforme en fascination et fétichisme malsain ». Norma montre que « les trans au Liban sont un divertissement, alors qu’ils sont assassinés, tabassés et sont obligés de vivre ensemble, car il n’y a pas d’emploi pour eux. Ils sont déshumanisés et dépouillés de leur dignité ».
La majorité de ces femmes ne peut pas ouvrir de compte en banque, payer un loyer ou même porter plainte auprès des autorités locales. Les ONG sont souvent les seuls employeurs des transgenres, étant donné la difficulté pour elles de décrocher un travail. « La plupart n’ont jamais eu accès à l’université, on essaye alors de leur donner les moyens pour vivre. On veut qu’ils connaissent leur droit », explique Norma. Selon elle, il faut privilégier l’éducation : « En tant que militante, je peux accepter, protéger et défendre tout le monde, même si les choix faits pour survivre diffèrent des miens. »


(Pour mémoire : Une soirée pour dire non à l’homophobie et la transphobie)


Vivre dans la peur
Dans les locaux de Helem à Mar Mikhaël, Naya Raghab, transgenre et militante, accompagne les victimes de violences au sein du comité trans de l’ONG : « On veut qu’ils se protègent et ne vivent plus dans la peur. » Tous les mois, elle constate des arrestations. « Deux aujourd’hui, il y a quelques jours c’était quatre, et il y a deux semaines, six. Beaucoup sont arrêtés à des checkpoints et subissent un harcèlement illégal, c’est une violation des droits de l’homme. » Les autorités peuvent avoir recours à l’article 534 du code pénal, qui prohibe les relations sexuelles « contraires aux lois de la nature ».

Dans une enquête réalisée en 2016, dans le cadre d’une étude sur la prévalence du VIH, 68 % des transgenres au Liban révélaient avoir subi des violences physiques, et 49 % des agressions sexuelles, tandis que 32 % furent victimes d’arrestations en raison de leurs identité et genre.
« La police inventera une histoire et les arrêtera sur base de l’article 534. Mais ils seront aussi testés pour usage de drogue, accusés de trafic humain, de prostitution avec l’article 523… », déplore Norma à propos des incarcérations quotidiennes de transgenres. L’arrestation peut être encore plus dangereuse pour les non-Libanais qui n’ont pas de permis de séjour, « ils sont vite déportés ». Ce fut le cas d’une Iranienne il y a deux semaines, mais les citoyens syriens sont les plus touchés.


(Lire aussi : La Beirut Pride annulée après l'arrestation, quelques heures durant, de son coordinateur)


Au poste de police de Hobeiche, à Ras Beyrouth, et dans plusieurs autres commissariats de la capitale, Naya dénonce le harcèlement moral et physique, et les viols à répétition : « On leur urine dessus et on les bat. » Sans caution payée pour leur sortie immédiate, les femmes transgenres resteraient parfois plusieurs mois enfermées, sans chefs d’accusation précis, ou seulement sur base de l’article 534 et sa définition trouble.
Certaines souffrent de stress post-traumatique quand elles sortent, et les policiers leur donnent de l’argent pour qu’elles ne racontent rien. « Pourtant, des victimes finissent par se livrer après avoir été détenues pendant des mois, parfois pendant une année complète. Impossible pour elles de se plaindre pendant les visites ou au parloir, « car les gardes surveillent ». Naya Raghab fut elle-même détenue plusieurs heures au commissariat de Raouché : « Les policiers voulaient me faire signer un papier stipulant que j’avais commis des actes homosexuels. Quand j’ai demandé un téléphone, ils m’ont giflée. » Elle assure que ce genre de situation arrive chaque jour.Après leur incarcération, Naya explique qu’un « point noir » est placé sur leurs papiers d’identité. Les transgenres ne peuvent plus ainsi voyager ou obtenir un emploi, « et dans le cas de l’article 534, la durée de ce point noir peut être étendue de 5 jusqu’à 10 ans ».


(Lire aussi : Quelques maux d’amour des LGBTQ)


« Nous ne sommes pas des victimes, mais des survivants »
« Même si vous réussissez à faire les démarches légales très compliquées, il faut partir à l’étranger et payer 50 000 dollars pour une opération irréversible. « En plus des difficultés pour accéder à la chirurgie de réassignation sexuelle, Norma affirme qu’il est impossible de dissimuler son identité quand on est une femme transgenre.
Elle n’en peut plus de voir ces vidéos, « d’assister aux violences, mais aussi de voir certains à la télévision qui généralisent, stigmatisent ces personnes ». Les deux activistes rappellent que la visibilité de leur combat reste limitée, mais qu’ils se font tout de même entendre à un niveau populaire : « Une nouvelle ère de militantisme débute. »
Tarek explique que la communauté est en permanence présentée comme victime, tandis que les transgenres au Liban « sont forts, soudés », et se démènent pour faire valoir leurs droits depuis des années. « Nous ne sommes pas des victimes, mais des survivants », déclare Norma en rappelant que le 11 mars dernier, les activistes trans de Beyrouth avaient pu se joindre au premier rang de la marche des droits des femmes.
« Au Liban, la porte de l’activisme LGBT a déjà été abattue, mais personne ne se sent assez en sécurité pour poser ses valises ici. » Les militants estiment que les récents succès ouvrent la voie à un changement de la société, mais cela n’a pas été sans épreuves. « Notre résilience s’est construite sur les corps assassinés et battus des femmes trans libanaises. »


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commentaires (7)

Je suis contre toute forme d injustice mais en même temps je suis contre toute forme de détourner la nature si Dieu voulait la créer femme ou homme il l aurait fait sans qu il ou elle ai recours à la chirurgie de transformation

Bery tus

08 h 24, le 08 août 2018

Tous les commentaires

Commentaires (7)

  • Je suis contre toute forme d injustice mais en même temps je suis contre toute forme de détourner la nature si Dieu voulait la créer femme ou homme il l aurait fait sans qu il ou elle ai recours à la chirurgie de transformation

    Bery tus

    08 h 24, le 08 août 2018

  • Toute personne humaine a droit à la diginité, au respect des autres. Notre dignité propre, réside dans celle à laquelle les autres ont droit, quelles que soient leurs orientations sexuelles, meme si parfois elles interpellent fortement, et qu'une distance infranchissable nous en sépare..

    LeRougeEtLeNoir

    15 h 36, le 07 août 2018

  • En quoi ces barbares stupides et criminels qui s'attaquent à ces malheureuses créatures transgenres se prétendent-ils meilleurs ou supérieurs ? Qui leur donne le droit de leur faire du mal physiquement ? Parions que certains de ces barbares au comportement criminel se réclament d'une religion...sunnite, chrétienne ou chiite,et vont à l'église ou à la mosquée ? Quand notre pays deviendra-t-il vraiment civilisé dans tous les domaines de la vie ? Irène Saïd

    Irene Said

    15 h 21, le 07 août 2018

  • Le Pape Francois a repondu qa ceux qui lui demande son avis sue les homosexuels QUI SUIS JE POUR JUGER UNE CREATURE QUE DIEU A CREE Cette phrase resume tout le probleme des gens qui sont contre toutes les differences sexueles, religieuses ou meme de couleurs Quand la loi au liban changera? Quand nos politiciens auront le temps de prendre des mesures humaines meme si celle ci ne rapporte pas de gros sous?

    LA VERITE

    14 h 09, le 07 août 2018

  • On avance tout simplement dans le nombre des annees, mais c'est pres ce que le meme peuple depuis 3,000 ans.

    Eddy

    11 h 57, le 07 août 2018

  • LOIN, TRES LOIN ENCORE LE JOUR OU TOUTES LES CREATURES DE DIEU AURONT LES MEMES DROITS AU LIBAN ET AU M.O.

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 50, le 07 août 2018

  • l'ignorance a son apogee

    George Khoury

    07 h 39, le 07 août 2018

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