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Idées - Point de vue

Plaidoyer pour une initiative franco-arabe sur la Palestine

Le président français Emmanuel Macron (à droite au premier plan) et son homologue palestinien Mahmoud Abbas (à gauche) assistant à une réunion à l'Elysée, le 22 décembre 2017. Archives AFP

La diplomatie française au Proche-Orient peut se réclamer d’un privilège, celui de jouer, au fil de l’histoire contemporaine, un rôle équilibré lors de la gestion du conflit israélo-palestinien. Depuis 1967, son discours maintient le cap en faveur de la solution de deux États, dont un État palestinien indépendant et viable. Sa position impartiale repose sur l’application des résolutions des Nations unies sur la question palestinienne et la condamnation constante de la colonisation israélienne des territoires arabes. Il s’agit pour la France de ne pas accepter les faits accomplis qu’Israël cherche à imposer avec acharnement.
Cette attitude française, ferme et équilibrée, s’est traduite à plusieurs reprises par un comportement décisif. Le monde se souvient de l’embargo sur les livraisons d’armes annoncé en 1967 par le général Charles de Gaulle, lors d’une conférence de presse historique, pour punir Israël d’avoir déclenché la guerre et occupé de nouveaux territoires en violation du droit international. Les Palestiniens n’ont jamais oublié le rôle de la France dans la protection de l’Organisation de libération de la Palestine et le sauvetage de son leader, Yasser Arafat, l’été 1982, lors de l’invasion israélienne du Liban et du siège de Beyrouth. À l’époque, la diplomatie française a œuvré pour permettre à l’OLP de mieux résister face aux pressions israélo-américaines et lui éviter la perspective d’une capitulation ou d’une disparition. Lors des négociations elle a ainsi pu obtenir un compromis honorable basé sur le principe d’« un plus politique pour un moins militaire » (selon une formule reproduite dans une note diplomatique du Quai d’Orsay du 8 septembre 1982). Autrement dit, l’abandon de la lutte armée depuis le Liban en échange d’un départ de Beyrouth dans la dignité, sous protection américaine et française. Ce scénario a permis de sauvegarder le statut de l’OLP en tant que représentant officiel du peuple palestinien.

Nouvel essor multilatéral
L’histoire de la gestion du conflit israélo-palestinien témoigne aussi d’innombrables initiatives françaises ou franco-arabes en faveur d’un règlement juste du conflit fondé sur les résolutions de l’ONU, seule condition d’une paix durable au Proche-Orient. La dernière initiative a eu lieu en janvier 2017, sous la présidence de François Hollande, avec l’organisation d’une « Conférence internationale pour la paix au Proche-Orient » où plus de 70 pays (dont les cinq membres du Conseil de sécurité de l’ONU) ont, au grand dam du gouvernement d’extrême droite israélien, appelé les deux parties « à démontrer leur engagement pour la solution à deux États, et à s’abstenir d’actions unilatérales (…), notamment sur les frontières, Jérusalem et les réfugiés ».
Certes, l’influence de telles initiatives sur le cours des événements est à relativiser, du fait de l’intransigeance israélienne et du laxisme américain à son égard. Mais leur mérite est multiple. D’abord, elles redonnent un nouvel essor à une action internationale multilatérale guidée par les résolutions onusiennes et par le droit international ; il est primordial aujourd’hui de suivre cette voie afin de défendre le rôle exclusif et indispensable de l’ONU dans le règlement du conflit israélo-palestinien. Ensuite, elles peuvent permettre à des Palestiniens désormais menacés de tout perdre face à des Israéliens en pleine offensive, d’être moins isolés.
L’adoption par la Knesset, le 19 juillet dernier, de la Loi fondamentale sur « l’État-nation du peuple juif », fait partie d’une série d’entraves à la paix, qui s’accumulent du côté israélien : de l’accentuation de la colonisation illégale en Cisjordanie et à Jérusalem-Est ; à l’intention confirmée de ne plus se retirer de cette partie de la ville sainte qui devrait être la capitale de la Palestine ; en passant par l’installation d’un régime d’apartheid contre les Palestiniens vivant en Israël, etc.
Quant à la reconnaissance de Jérusalem-Est comme capitale d’Israël par l’administration américaine, en décembre dernier, elle semble donner un blanc-seing au gouvernement israélien pour poursuivre les démarches qui risquent d’enterrer l’idée de la création de l’État palestinien indépendant en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem-Est. Les révélations et les spéculations sur le « plan de paix » du président Donald Trump pour régler le conflit augurent mal quant aux éventuels arrangements envisagés. Les Palestiniens seraient invités à abandonner leurs droits – pourtant inaliénables – concernant la libération de l’ensemble de la Cisjordanie, la souveraineté sur Jérusalem-Est, le retour des réfugiés et la constitution d’un véritable État indépendant et souverain.

Reprendre l’initiative
Face à cette ligne dure noircissant l’avenir de la paix, une nouvelle mission est à assumer par la France, celle de reprendre l’initiative et de conduire le camp des États rejetant les politiques israéliennes et américaines. L’affirmation récente du roi de l’Arabie saoudite, Salmane ben Abdelaziz, selon laquelle son pays n’approuverait aucun plan de paix ne prévoyant pas le partage de Jérusalem, ouvrirait une perspective de collaboration franco-arabe pour initier une nouvelle dynamique en faveur des Palestiniens. Si la position de Riyad est maintenue, la diplomatie française devrait saisir l’occasion en vue de tenter de mener ensemble une action au Conseil de sécurité visant à contrarier la politique de Trump, quitte à pouvoir tenir tête aux éventuelles pressions américaines.
L’utilité d’une éventuelle initiative franco-saoudienne à l’ONU augmenterait par ailleurs si elle venait à être suivie par la réorganisation, sur initiative française, d’une conférence internationale ayant cette fois pour objectif de reconnaître d’une manière multilatérale l’État palestinien indépendant.
De telles actions auraient le mérite de réconforter l’autorité palestinienne du président Mahmoud Abbas, dans sa confrontation disproportionnée avec le couple israélo-américain. Quant à la France, elle aurait tout à gagner à se montrer ainsi fidèle à sa politique traditionnelle et équilibrée, en réaffirmant son attachement à une solution pacifique juste du conflit israélo-palestinien.


Nabil el-Khoury
est enseignant à l’Université libanaise et à l’Université Antonine.


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commentaires (3)

laissez tomber votre pessimisme les amis. le petit macron risque de vous eblouir de savoir faire diplomatique, d'idees aussi nouvelles que serieuses. Halleluja , vs allez tres bientot voir hamye,machaal &bibi ensemble a papoter .

Gaby SIOUFI

10 h 41, le 15 août 2018

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Commentaires (3)

  • laissez tomber votre pessimisme les amis. le petit macron risque de vous eblouir de savoir faire diplomatique, d'idees aussi nouvelles que serieuses. Halleluja , vs allez tres bientot voir hamye,machaal &bibi ensemble a papoter .

    Gaby SIOUFI

    10 h 41, le 15 août 2018

  • Il suffit que les grands de ce monde se mettent autour d'une table avec la ferme volonté d'imposer la paix dans cette région et en premier lieu au conflit israélo-palestinien! Le souci : c'est que tout le monde en fait sa priorité sans jamais vraiment s'impliquer!

    Sarkis Serge Tateossian

    11 h 52, le 12 août 2018

  • LE MALHEUR C,EST QUE SANS LES AMERICAINS AUCUNE INITIATIVE NE SERAIT VIABLE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 40, le 12 août 2018

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