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Moyen Orient et Monde - Yémen

Riyad sous grosse pression après l’attaque qui a tué 29 enfants au Yémen

Le Conseil de sécurité réclame une enquête transparente, indépendante et crédible.

Le bus détruit par la frappe de la coalition contre les houthis au Yémen qui a tué 29 enfants. AFP

Les vidéos de Saada qui circulent depuis deux jours sur les réseaux sociaux ont horrifié des milliers d’utilisateurs. On y voit des dizaines de corps ensanglantés gisant au sol ou entassés à l’arrière d’un pick-up, tandis qu’un père hurle sa douleur en portant la dépouille mortelle de son enfant. D’autres images montrent de petits garçons à l’air hagard qui viennent d’être dépêchés à l’hôpital le plus proche pour y être traités. Au total, l’attaque de la coalition menée par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis au Yémen sur Saada jeudi matin a fait 130 victimes, selon les autorités de la ville située au nord-ouest du pays. Parmi eux, se trouvent « 51 morts, incluant 40 enfants, et 79 blessés, dont 56 sont des enfants. Les chiffres parlent d’eux-mêmes », a déploré hier Johannes Bruwer, chef du Comité international de la Croix Rouge (CICR) au Yémen, sur son compte Twitter. Selon le New York Times, le bus circulait dans un marché et transportait des écoliers qui participaient à un voyage récréatif avec un programme de mémorisation du Coran.

Jeudi, « la guerre contre les enfants au Yémen a atteint un point critique », affirme à L’Orient- Le Jour Juliette Touma, chef régionale de la communication de l’Unicef au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. « L’Unicef peut confirmer qu’il s’agissait de la plus grande attaque contre des enfants au Yémen depuis l’escalade du conflit en mars 2015, c’est-à-dire avec le plus grand nombre d’enfants tués en un incident », poursuit-elle. C’est à cette date que la coalition menée par Riyad est intervenue dans la guerre au Yémen pour venir appuyer le président yéménite, Abd Rabbo Mansour Hadi, face aux rebelles houthis, soutenus par l’Iran.


(Lire aussi : Les houthis suspendent leurs attaques en mer Rouge)


Suite au tollé provoqué par l’attaque, le Conseil de sécurité de l’ONU a annoncé hier qu’il s’est réuni à huis clos pour évoquer les enfants qui ont perdu la vie dans l’attaque attribuée à la coalition menée par Riyad, ont annoncé des diplomates. Cette réunion s’est tenue à la demande de la Bolivie, des Pays-Bas, du Pérou, de la Pologne et de la Suède, des pays qui ne sont pas membres permanents du Conseil de sécurité. « Nous avons vu les images des enfants qui sont morts », a déclaré à la presse l’ambassadrice adjointe des Pays-Bas à l’ONU, Lise Gregrois-Van Haaren. « Ce qui est crucial maintenant, c’est d’avoir une enquête crédible et indépendante », a-t-elle insisté. Le Koweït, membre non permanent du Conseil, fait par ailleurs aussi partie de la coalition menée par le royaume wahhabite.
La présence des Pays-Bas et de la Suède sur la liste, deux pays qui font de la défense des droits de l’homme une des priorités de leur diplomatie, n’est pas anodine, alors que le contexte actuel est bien délicat pour l’Arabie saoudite. Le royaume wahhabite a annoncé lundi l’expulsion de l’ambassadeur du Canada à Riyad et le gel des relations commerciales entre les deux pays suite aux critiques canadiennes sur le traitement saoudien à l’égard des militants des droits de l’homme considérées comme « des ingérences dans ses affaires intérieures ».

Selon les observateurs, la stratégie saoudienne vise à faire taire les critiques à l’égard de la répression menée par le royaume. Une manière de procéder qui a fonctionné cette semaine puisque l’affaire a donné lieu à peu de réactions des Occidentaux, qui fournissent Riyad en armement. Elle semble cependant avoir trouvé ses limites hier. « La question est maintenant de savoir si cela (cette attaque) marque un tournant, le moment qui va inciter les parties en guerre, le Conseil de sécurité de l’ONU et la communauté internationale à faire ce qu’il faut pour les enfants et à mettre fin à ce conflit », a estimé dans un communiqué la directrice générale de l’Unicef, Henrietta Fore.


(Lire aussi : Le Hezbollah dénonce le "crime barbare de la coalition saoudo-américaine" au Yémen)



Contre-version saoudienne
Face à l’indignation générale, le commandement de la coalition a « ordonné l’ouverture immédiate d’une enquête en vue d’évaluer les événements, d’élucider leurs circonstances (...) », a affirmé hier un haut responsable de l’alliance militaire. Cette décision fait suite aux informations rapportées « par les médias et des organisations internationales travaillant au Yémen à propos d’une opération des forces de la coalition dans la province de Saada jeudi et d’un bus de passagers ayant subi des dommages collatéraux de cette opération », a-t-il précisé, selon l’agence de presse officielle saoudienne SPA.

Si la coalition a reconnu avoir mené une frappe aérienne qui a touché un bus, elle a d’abord donné une version des faits bien différente de celle des organisations internationales, estimant que ces raids étaient conformes au droit international et au droit international humanitaire, accusant les houthis de se servir d’enfants comme de boucliers humains. Elle soutient que le véhicule ne transportait pas des enfants, mais des « combattants houthis », a déclaré à l’AFP son porte-parole, Turki al-Maliki. Selon une source de la coalition interrogée jeudi par le site prosaoudien al-Arabiya, le raid a tué « un certain nombre de commandants de la milice sur le terrain ». Trois entraîneurs des combattants houthis ont péri dans l’attaque, rapporte cette même source. Pour M. Maliki, l’objectif de l’opération à Saada était de « cibler des éléments qui ont planifié et exécuté des civils pris pour cible entre mercredi soir et jeudi dans la ville de Jizan », rapporte al-Arabiya. Il a souligné que les éléments à l’origine de cette opération étaient présents dans le bus et a mis en garde contre les combattants qui se cachent parmi les civils.
La version semblait déjà avoir peu convaincu jeudi, alors que les États-Unis ont demandé à la coalition de mener « une enquête approfondie et transparente sur cet incident ». Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a pour sa part condamné cette attaque jeudi et demandé « une enquête indépendante et rapide », selon son porte-parole, une réclamation saluée par les houthis.


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commentaires (2)

Il semble qu’une horreur, désolé une “erreur”, serait plus acceptable si elle est accompagnée de sanctions … Pourquoi ne peut-on pas juger une « erreur » sans pour autant la comparer aux autres « erreurs » …

Nader

11 h 41, le 11 août 2018

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Commentaires (2)

  • Il semble qu’une horreur, désolé une “erreur”, serait plus acceptable si elle est accompagnée de sanctions … Pourquoi ne peut-on pas juger une « erreur » sans pour autant la comparer aux autres « erreurs » …

    Nader

    11 h 41, le 11 août 2018

  • LES ERREURS SE PAIENT POUR LE YEMEN ... ET POUR LA SYRIE ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 47, le 11 août 2018

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