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Liban - Environnement

La pollution de douze nouvelles cheminées inquiète les résidents de Jiyé

L’arrivée du troisième navire-centrale turc au large de l’Iqlim el-Kharroub suscite mécontentement et déception au sein de la population.

La cheminée de la centrale électrique de Jiyé. Photo Maude Petel-Légaré

Une plage dorée, une eau turquoise et quelques chaises sous des parasols, dans un centre balnéaire dans la baie de Jonas. Au large, douze cheminées d’où émanent des gaz opaques contrastent avec l’horizon de la mer Méditerranée. Avec ses allures métalliques et sa carrure imposante, le navire-centrale au large de Jiyé ne passe pas inaperçu.

Pour parer au problème chronique de l’approvisionnement en courant électrique, un troisième navire-centrale turc, affrété par le gouvernement, est arrivé au large de Jiyé, une localité qui accueille de nombreuses plages touristiques, mais aussi une centrale électrique et un autre navire-centrale. Comme la plupart des résidents de la ville, le Rassemblement national de l’Iqlim el-Kharroub s’est opposé à l’arrivée de ce deuxième navire qui sera une source de pollution de l’air supplémentaire. Celui-ci « rejette par principe le recours (du gouvernement) à ces navires pour la production de l’énergie et insiste sur le fait qu’une solution meilleure et plus appropriée consiste à construire de nouvelles centrales modernes qui tiennent compte des critères écologiques pour la production de l’électricité », est-il écrit dans un communiqué paru dimanche dernier.
Pour le propriétaire d’un centre balnéaire proche de la centrale, Nassif Azzi, cette nouvelle est synonyme de désolation. « Ça m’attriste beaucoup. Je suis très attaché à la terre, à la tradition, à l’histoire. Il y a une dizaine d’années, c’était une magnifique baie et le milieu marin était sain. Tout a été ravagé », déplore-t-il en pointant du doigt les différentes usines voisines de sa propriété.
« Je suis scandalisée », déclare Samara Azzi, résidente de Jiyé. En plus d’avoir les causes environnementales à cœur, elle est très engagée auprès du mouvement civil Lebnen qui a pour mission de nettoyer la ville et les plages. « Après tous les efforts que nous faisons pour améliorer les conditions de vie dans la localité, l’arrivée de ce navire est ressentie comme une trahison de la part du gouvernement », explique-t-elle.

Pour d’autres résidents, l’arrivée soudaine de cet énorme bateau a suscité une vague d’incompréhension. « Personne ne nous en a avertis, explique le propriétaire d’une autre station balnéaire, Georges Boustany. Ils nous ont mis devant le fait accompli. » Pour celui-ci, cette nouvelle centrale devrait avoir des répercussions catastrophiques sur le tourisme. « L’arrivée de ce navire, avec ses douze cheminées supplémentaires, n’est pas bonne pour l’image de la région, met-il en avant. Depuis 40 ans, nous subissons la pollution de la centrale électrique, et là, le gouvernement nous impose un nouveau navire-centrale. »


(Lire aussi : La nouvelle barge restera à Jiyé pour trois mois non renouvelables, selon le PSP)


« On continue à punir notre région »
Selon le journaliste Mohammad el-Jannoun, spécialisé dans les causes environnementales, il n’y a pas de procédures écologiques claires qui sont appliquées dans ces usines. Il précise que c’est la vieille centrale électrique qui nuit le plus à la région, et c’est la population de Barja, un autre village de l’Iqlim, qui en subit principalement les conséquences. « À Barja, chaque année, près de 80 % des décès sont causés par des cas de cancer », explique Mohammad el-Jannoun, lui-même résident de ce village. « Barja est grandement affecté par la fumée de cette centrale électrique qui fonctionne au mazout », complète Georges Boustany.
Pour Jad Damaj, l’un des porte-parole du mouvement civil Barja, actif sur les réseaux sociaux, la lutte contre ces industries polluantes est loin d’être gagnée. « Nous ne pouvons plus tolérer la pollution. Ils continuent à punir notre région après que nous avons réussi à protester en bloquant la route pendant deux jours en 2015 pour refuser un projet de décharge dans notre région », explique-t-il. Voilà pourquoi il considère que l’arrivée du navire-centrale dans cette région n’est pas du tout étonnante.
Et pourtant, cette réaction populaire de 2015 ne se manifeste pas aujourd’hui. « Il n’y a pas eu de grands mouvements de protestations à l’arrivée du troisième bateau, étant donné l’ampleur des problèmes environnementaux déjà existants, liés aux déchets, aux usines et à la production d’électricité. Tout cela affecte déjà grandement la population », constate Mohammad el-Jannoun.


(Lire aussi : Électricité : La nouvelle barge restera en service à Jiyeh jusqu’au 16 octobre)

« Le gouvernement n’a pas résolu la crise »
Ce nouveau navire a beau être une source de pollution supplémentaire, la réalité complexe du secteur de l’électricité au Liban est plus nuancée, selon certains. « Force est de constater que le carburant qui est utilisé par ce bateau est moins polluant que celui utilisé dans la centrale électrique existante », explique Mohammad el-Jannoun. Il précise que le navire-centrale génère deux fois plus d’électricité que la centrale électrique actuelle.
Le Rassemblement national de l’Iqlim el-Kharroub ressent, quant à lui, une certaine satisfaction par rapport à l’augmentation future de l’approvisionnement en courant dans la région. « La présence d’un navire-centrale sur les côtes de l’Iqlim commande un accroissement des heures de distribution du courant dans cette région », est-il précisé dans le communiqué du rassemblement.
Mais pour les résidents de la région, les problèmes environnementaux restent le principal enjeu lié à l’arrivée de ce navire. « La côte de notre région est déjà dangereuse à cause de toute la pollution existante. Le gouvernement n’a pas résolu la crise et il ne prévoit aucune solution pour la résoudre. Il y a des déchets partout. C’est une crise politique », déplore Mohammad el-Jannoun.
Pour Nassif Azzi, le navire-centrale dégrade énormément une situation déjà complexe. « À quel prix vous nous faire subir cela ? Pour augmenter l’éclairage de nos maisons de deux heures seulement ? » se demande-t-il, tout en regardant au loin le colossal navire-centrale turc.


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Une plage dorée, une eau turquoise et quelques chaises sous des parasols, dans un centre balnéaire dans la baie de Jonas. Au large, douze cheminées d’où émanent des gaz opaques contrastent avec l’horizon de la mer Méditerranée. Avec ses allures métalliques et sa carrure imposante, le navire-centrale au large de Jiyé ne passe pas inaperçu. Pour parer au problème chronique de...

commentaires (2)

Ces navires poubelles, ne peuvent "officier" que dans des zones de non droits comme dans certains endroits d'Afrique et quelques pays de la méditerranée.... (Merci aux autorités libanaises) Dans les pays civilisés, les autorités ne leur accordent même pas le droit de naviguer ... Et les ONG comme Greenpeace ne les aurait jamais laissé tranquille! Je Une vraie aberration ces navires de la honte.

Sarkis Serge Tateossian

09 h 16, le 19 juillet 2018

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Commentaires (2)

  • Ces navires poubelles, ne peuvent "officier" que dans des zones de non droits comme dans certains endroits d'Afrique et quelques pays de la méditerranée.... (Merci aux autorités libanaises) Dans les pays civilisés, les autorités ne leur accordent même pas le droit de naviguer ... Et les ONG comme Greenpeace ne les aurait jamais laissé tranquille! Je Une vraie aberration ces navires de la honte.

    Sarkis Serge Tateossian

    09 h 16, le 19 juillet 2018

  • LES CHEMINEES DE CES BARGES SONT TRES POLLUANTES A CAUSE DU HEAVY FUEL QUE LES MACHINES DES GENERATEURS CONSUMENT !

    JE SUIS PARTOUT CENSURE POUR AVOIR BLAMER GEAGEA

    06 h 58, le 19 juillet 2018

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